Du Myanmar au Vietnam – Des militants pour la démocratie partagent leurs expériences pour un “changement sans violence”

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10 décembre 2015

De Giang Nguyễn

Le mouvement pour la démocratie au Myanmar a peut-être encore un long chemin à parcourir, mais les groupes d’opposition vietnamiens font déjà l’analyse de la transition politique pour appliquer leurs enseignements à leurs propres objectifs d’une société démocratique au Vietnam.

Quatorze militants vietnamiens pour la démocratie, des défenseurs des droits de l’homme et des journalistes citoyens ont rencontré des groupes de la société civile birmane, notamment Democratic Voice of Burma, l’Association d’aide aux prisonniers politiques et la Ligue nationale pour la démocratie (LND). Une bonne moitié du groupe viennent de diverses régions du Vietnam, tandis que les sept autres sont issus de la diaspora vietnamienne. Sept autres citoyens vietnamiens ont été empêchés de quitter le pays par les autorités vietnamiennes.

Le voyage d’étude de trois jours portant sur les “Leçons du Myanmar”, organisé par le parti pro-démocratie Viet Tan, débutait plus tôt cette semaine et se tenait exceptionnellement au siège de la Ligue nationale pour la démocratie à Rangoon.

“Les accomplissements de la LND au cours des trois dernières décennies nous ont inspirés”, a déclaré Duy Hoàng, porte-parole de Viet Tan à l’ancien général U Tin Oo, président émérite de la LND, qui a reçu la délégation vietnamienne. Tin Oo, ensemble avec l’icône de la démocratie Aung San Suu Kyi, avait fondé la LND en 1988.

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Collage du visage d’Aung San Suu Kyi devant le siège de la Ligue Nationale pour la Démocratie (LND).

La LND avait été déclarée illégale par la junte militaire du Myanmar mais avait ensuite été autorisée à s’inscrire en tant que parti politique. L’organisation a connu une victoire écrasante le 8 novembre lors des élections législatives qui, malgré quelques irrégularités, ont été saluées par la communauté internationale et le président américain Barack Obama. Le Myanmar n’avait pas eu d’élections libres depuis 25 ans. C’était donc une étape importante dans la lutte difficile de son peuple pour la démocratie et les droits de l’homme.

Le Général Tin Oo a confié au groupe que les pressions politique et économique ont été un des facteurs qui a permis les récentes réformes des généraux au pouvoir.

“Un autre facteur a été le soutien des pays démocratiques, notamment celui des États-Unis, l’impact de la sanction économique les a fortement touchés, même s’ils prétendent qu’ils n’ont pas été affectés par les sanctions économiques des États-Unis ou de l’Union Européenne” a-t-il dit.

“Tout du long, nous sommes restés accrochés aux principes des droits de l’homme et de la démocratie”, a ajouté le porte-parole de la LND U Nyan Win. “Nous demandions la démocratie et les droits de l’homme et nos principaux sympathisants étaient des Etats-Unis ou d’Europe. La plupart des gouvernements de l’ASEAN ne nous soutenaient pas, mais la majorité de l’opposition de l’ASEAN nous apportaient leur soutien et nous sommes en contact avec eux”.

Au cours d’une séance de questions et réponses mouvementée, un des participants au voyage d’étude a rapporté à Tin Oo que le peuple vietnamien s’était réjoui d’apprendre que la LND avait remporté la victoire.

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Le porte-parole de Viet Tan, Duy Hoang (à droite) rencontre le porte-parole de la LND U Nyan Win.

Mais le général a répondu prudemment. “Oui nous sommes très heureux. Mais nous ne pouvons pas encore en profiter”, a-t-il dit. “Voyez-vous, nous avons encore beaucoup de choses à surmonter. Nous devons être prudents et réfléchir de manière réaliste et voir comment continuer, comment nous dépasser.”

Plus tard, au cours d’une table ronde organisée conjointement par Viet Tan et Phandeeyar Myanmar Innovation Lab, des représentants de groupes locaux et internationaux de sociétés civiles faisaient l’écho de ce sentiment d’optimisme prudent mêlé d’anxiété concernant l’avenir du Myanmar.

Celui qu’on appelle Zarni est un ancien prisonnier politique et a passé huit ans à la tristement célèbre prison de Thayawaddy.

En tant qu’ancien chef du groupe d’étudiants pro-démocrates Génération 88, il confiait à Loa avoir soutenu et voté pour la LND en novembre dernier.

Mais d’après lui, la corruption peut exister aussi bien au gouvernement qu’au sein de l’opposition.

La plupart des organisations de sociétés civiles “ne connaissent pas le rôle qu’ils ont à jouer”, dit-il. “Ils osent lutter contre le régime militaire. Mais ils n’osent pas critiquer l’opposition. Ça peut être dangereux pour l’avenir”.

“C’est pourquoi j’ai décidé de ne pas devenir membre du parlement. Parce que je voudrais faire en sorte de vérifier [et d’être certain] que l’équilibre existe de chaque côté”, dit-il.

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La délégation vietnamienne rencontre Ko Ko Gyi au siège de Generation 88.

Au cours de la table ronde et durant ces trois jours, les participants vietnamiens et birmans ont appris comment mobiliser le soutien international, s’améliorer, s’organiser, et comment ces responsabilités peuvent être coordonnées entre militants en exil et militants à l’intérieur du pays.

“Quand je rentrerai au Vietnam, je pourrai partager tout ce que j’ai appris ici avec tous les membres de notre organisation”, a déclaré Truong Quoc Phong, le fondateur de Dan Tri Viet, ou L’intellect du Peuple, un groupe qui vise à éveiller la conscience sociale au sein de la jeunesse vietnamienne. “Je peux être la passerelle entre les militants pour la démocratie en Birmanie et ceux au Vietnam qui n’ont pas été en mesure ou non pas été autorisés à venir.”

“Ce que j’aime le plus chez nos amis birmans, c’est qu’ils se concentrent sur tous les segments de la population”, a expliqué Trần Anh Vũ.

“Au Vietnam, nous [notre mouvement d’opposition] sommes encore limités aux victimes directes du gouvernement” ajoute-t-il, en se référant aux défenseurs des droits de l’homme victimes de persécutions. “Les victimes indirectes, ceux qui souffrent ou qui sont réduits au silence, le mouvement pour la démocratie au Vietnam ne s’est pas encore penché sur eux”.

Les participants ont également dû batailler avec des problèmes plus terre à terre : comment surmonter l’apathie et les divisions internes aussi bien au sein que parmi les différents groupes et différents membres de la société civile. Billy Ford de Freedom House, une organisation non gouvernementale qui promeut la démocratie, la liberté politique et les droits de l’homme, a fait des parallèles dans les deux pays totalitaires : “L’objectif du gouvernement du Myanmar était de diviser pour régner. Diviser les défenseurs des droits de l’homme selon des critères ethniques ou religieux”.

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Generation Wave partage avec la délégation vietnamienne leurs expériences sur la désobéissance civique.

Il a déclaré que le plus grand des challenges pour les groupes d’opposition était de savoir comment rester cohérent afin de construire le mouvement. “Il est très difficile de gagner la confiance des gens et de maintenir des relations malgré la distance”, dit-il, se référant aux groupes en exil et ceux à l’intérieur du pays. “En travaillant avec les défenseurs des droits de l’homme vietnamiens, j’ai compris que ce facteur confiance était un énorme challenge. Le manque de capacité à communiquer à travers le pays provoque un certain sentiment de méfiance et d’incompréhension, qui est en quelque sorte voulu par le gouvernement”.

Le voyage d’étude a également comparé les notes des mouvements d’opposition vietnamiens et birmans avec Generation Wave, un groupe qui faisait partie d’un réseau politique clandestin à l’intérieur et l’extérieur de la Birmanie, et Myanmar Egress, une organisation à but non lucratif créée par des universitaires et des travailleurs sociaux du Myanmar.

Dans les bureaux du groupe d’étudiants Génération 88, Ko Ko Gyi, un célèbre militant birman qui figurait parmi les chefs des étudiants ayant mené le soulèvement de 1988, a expliqué à Loa ce qui le poussait à continuer le combat après trois décennies à faire des allers-retours en prison. Il a été arrêté plusieurs reprises et a passé plus de 17 ans derrière les barreaux. Sa détermination et son esprit combatif restent intacts. Il dit qu’il va créer son propre parti politique.

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Ko Ko Gyi raconte ses souvenirs d’activisme comme si c’était hier.

“Nous avons changé notre pays sans violence”, dit-il.

Lorsqu’on lui a demandé s’il aurait aimé vivre une vie pus simple, sa réponse a été “Je ne veux pas être un homme simple”.

Ce n’est qu’une simple résolution en ces moments difficiles et une leçon de détermination pour les étudiants vietnamiens du changement.

Source : Loa

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