Le journaliste Nguyen Vu Binh a été libéré !

AFP

Vietnam : un dissident libéré à la veille d’une visite officielle aux USA

Le journaliste Nguyen Vu Binh.

Le Vietnam a opportunément libéré un dissident célèbre à moins de deux semaines d’une visite du président Nguyen Minh Triet aux Etats-Unis que la question des droits de l’Homme risquait de faire capoter. Nguyen Vu Binh, journaliste de 39 ans qui purgeait une peine de sept ans de prison, a bénéficié vendredi d’une amnistie du président vietnamien, a annoncé dimanche l’Agence vietnamienne d’information (AVI), précisant qu’il avait rejoint son domicile dès sa sortie de prison samedi.

Un responsable de la prison de Nam Ha, au sud de la capitale Hanoï, a confirmé sa libération sous couvert de l’anonymat.

Arrêté en septembre 2002, Binh avait été reconnu coupable “d’espionnage” en décembre 2003 après avoir critiqué sur internet un accord frontalier sino-vietnamien très controversé et accusé Hanoï d’avoir cédé des terres à Pékin. En 2001, il avait auparavant demandé la permission de créer un parti politique dans un pays où seul le Parti communiste est autorisé. Il avait été également impliqué dans la création d’une organisation anticorruption alors rejetée par le gouvernement.

Selon l’AVI, Binh a requis la clémence dans une lettre dans laquelle il exprime son “souhait de retrouver sa famille” tout en promettant “d’exercer pleinement ses droits et devoirs de citoyens”. Sa libération, réclamée de longue date par les Etats-Unis, intervient à point nommé, moins de deux semaines avant la visite officielle de Nguyen Minh Triet à Washington le 22 juin, la première d’un président vietnamien sur le sol américain depuis la fin de la guerre en 1975.

Les Etats-Unis et le Vietnam, qui affiche l’un des taux de croissance économique les plus forts au monde, se sont considérablement rapprochés ces dernières années. Mais leur dialogue s’est tendu récemment sur la question des droits de l’Homme alors que Hanoï a multiplié les arrestations et condamnations de dissidents pour “propagande” contre le régime communiste.

La Liberté de la Presse

La libération de Binh “est une concession aux Etats-Unis avant la visite de Triet qui était vraiment en danger”, a commenté dimanche un diplomate étranger à Hanoï. Prévue depuis de longs mois, la date de la visite du président vietnamien, qui selon la presse vietnamienne pourrait déboucher sur un accord commercial cadre, n’a d’ailleurs été officiellement confirmée que cette semaine.

Jeudi, Washington avait indiqué que la visite serait certes l’occasion de discuter de “relations économiques et commerciales solides”, de coopération en matière de santé et de développement, de relations culturelles et éducatives, ainsi que des questions “pendantes remontant à la guerre” du Vietnam.

Mais la Maison Blanche avait aussi souligné que le président américain en profiterait pour exprimer “sa profonde inquiétude devant l’augmentation récente des arrestations et des détentions de pacifiques militants de la démocratie au Vietnam” et noter “que de tels agissements limiteront inévitablement la croissance des relations bilatérales”.

Plusieurs organisations internationales militaient elles aussi depuis des mois pour la libération de Nguyen Vu Binh, notamment Reporters sans frontières (RSF), qui avait demandé en vain son amnistie à l’occasion du nouvel an lunaire du Têt en février.

L’organisation de défense de la liberté de la presse, qui avait fait valoir le mauvais état de santé de Binh, avait appelé Hanoï à “faire preuve de clémence envers” un homme dont “le seul crime est de s’être exprimé librement sur Internet”.


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