Situation de la presse et de la liberté sur Internet au Vietnam

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Vingt ONG de défenses des droits de l’homme, dont Viet Tan, ont co-organisé le Sommet de Genève pour les Droits de l’Homme et la Démocratie, qui s’est déroulé les 15 et 16 mars 2011. Durant cette 3ème édition, 6 panels étaient proposés, concernant la situation au Darfour, les droits des homosexuels en Afrique, les révolutions en Tunisie et Egypte, les arrestations arbitraires dans le monde, la situation des droits de l’homme en Chine et la liberté d’expression dans la presse et sur internet.

Mme Nguyen Thi Thanh Van, journaliste à Radio Nouvel Horizon et membre du comité central de Viet Tan, a participé à ce dernier panel à travers le discours ci-dessous, et les échanges avec d’autres défenseurs des droits de l’homme que sont Miguel Rodriguez, député vénézuélien et ancien journaliste persécuté par le régime d’Hugo Chavez, et Grace Kwinjeh, journaliste et fondatrice du Movement for Democratic Change au Zimbabwe.


Situation de la presse et de la liberté sur Internet au Vietnam

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Mesdames et messieurs,

La situation des droits de l’homme au Vietnam se dégrade de plus en plus, particulièrement dans le domaine des libertés de la presse et Internet

Je voudrais illustrer cette situation à travers un cas concret et récent.

Le 10 août dernier, à 7 heures du matin, j’ai reçu un appel téléphonique du Vietnam m’alertant que M. Pham Minh Hoang, un membre de Viet Tan, est convoqué à la Sécurité Publique. Après trois journées d’interrogatoires, Hoang a été mis en détention jusqu’à aujourd’hui.

Pourquoi l’avoir arrêté ? Maître de conférences en mathématiques à l’école polytechnique de Saigon, Hoang est aussi un blogueur. Sous le pseudonyme Phan Kien Quoc, il a écrit des textes critiques envers le régime. Il a également organisé gratuitement des séances de formations de leadership pour ses étudiants. Enthousiasmés, ceux-ci ont ensuite créé des forums de discussions en ligne afin de faire partager leurs connaissances aux autres. A cause de ses activités en ligne, Hoang a été arrêté puis mis en examen pour tentative de renversement du régime.

Concernant la situation de la presse, au Vietnam, il y a plus de 600 médias et 40 chaînes de télévision. Tous sont sous le contrôle des autorités vietnamiennes. Ainsi, lorsque certains journalistes effectuent des enquêtes trop poussées sur le sujet de la corruption impliquant des hauts fonctionnaires, ils sont ciblés par les autorités. Les plus chanceux sont licenciés. Les autres passent par la case prison.

A côté de ces médias publics aux discours convenus, se développent de plus en plus des médias soit-disant indépendants sous forme de blogs personnels, de sites Internet d’informations. Certains d’entre eux attirent quotidiennement des milliers de visiteurs à la recherche d’informations non censurées. Non autorisés par le gouvernement, leurs auteurs sont victimes de la répression policière. Pour les sites basés à l’étranger, le régime pratique la censure à distance en utilisant les cyber-attaques. Nos sites Internet, Viettan.org et radiochantroimoi.com sont régulièrement victimes de cyber-attaques de type déni de services avec des ordinateurs dont l’adresse IP se trouve au Vietnam. De plus, les autorités n’hésitent pas à envoyer aux internautes vietnamiens des emails piégés contenant des logiciels espions, permettant ensuite le vol des mots de passe de compte email ou de blog personnel. Par ailleurs, il existe au Vietnam un pare-feu qui empêche les internautes vietnamiens d’accéder à certains sites basés à l’étranger comme celui de Human Rights Watch.

Face aux activistes pour la liberté d’expression, les autorités répondent par la manière forte. Depuis 4 ans, des dizaines d’activistes ont été arrêtés arbitrairement, jugés pour des motifs bidon et condamnés parfois à de très lourdes peines, jusqu’à 16 ans de prison. Et bien sûr sans droit à la défense.

Le dernier procès de ce genre date du 26 janvier dernier où l’activiste pour la démocratie Vi Duc Hoi a été condamné à 8 ans de prison pour ses écrits sur Internet, ses interviews données à des médias étrangers, qui sont considérés par le régime comme de la « propagande contre l’état et contre le parti ».

De nombreux activistes pour la démocratie se trouvent actuellement derrière les barreaux. Vous pouvez trouver les noms et les détails dans la brochure Voices of Conscience qui est régulièrement mise à jour par Viet Tan. Quatre de nos membres sont actuellement emprisonnés au Vietnam. Afin de montrer l’image d’un état de droit, le régime vietnamien s’appuie sur un arsenal juridique pour museler l’opposition démocratique et dissuader les gens d’entrer dans l’activisme politique. Ainsi, les activistes qui sont membres d’une organisation ou d’un parti politique sont accusés de « tentative de renversement de l’état » (article 79 du code pénal) ou bien de « terrorisme » (article 84) si cette organisation est basée à l’étranger. Pour tous les autres, le régime les accuse de « propagande contre l’état et contre le parti » (article 88). Cette loi est tellement vague que n’importe qui pourrait se retrouver accusé de ce crime.

Par ailleurs, en cas de besoin, le régime n’hésite pas à monter de toutes pièces des histoires, à falsifier des preuves pour étayer leurs accusations. Personnellement, j’ai été victime de cette pratique.

J’ai été arrêtée à Saigon en novembre 2007 lors d’un voyage au Vietnam pour couvrir la diffusion par Viet Tan des méthodes de lutte non violente. Cinq autres personnes membres de Viet Tan ont été arrêtées en même temps que moi. Lors de notre arrestation, la Sécurité Publique n’avait trouvé que des tracts sur la lutte non violente. Mais afin de justifier leurs accusations de « terrorisme » à notre encontre, elle n’avait pas hésité à glisser un pistolet dans les bagages d’un couple de touristes américano-vietnamiens. Puis elle a obligé le couple à déclarer que l’arme était destinée à Viet Tan. Manque de chance, ce couple venait de Los Angeles et il était inconcevable pour les autorités américaines qu’un pistolet puisse être embarqué à bord d’un avion décollant de cet aéroport. Devant le tollé suscité par ce montage grossier, le régime vietnamien m’a libérée au bout de 25 jours de détention, sans procès.

Actions de Viet Tan

Devant cette situation, Viet Tan mène des actions concrètes : soutenir la liberté sur Internet et dénoncer les abus judiciaires au Vietnam.

1/ Liberté sur l’Internet

Depuis plusieurs années, Viet Tan mène campagne pour soutenir la liberté sur Internet au Vietnam, pour informer les internautes vietnamiens comment utiliser les outils pour contourner la censure, pour protéger leur vie privée et pour rester à l’abri des emails piégés du régime, etc. Ces méthodes, outils, tutoriaux sont disponibles sur le blog No Firewall (http://nofirewall.blogspot.com).

Nous serions heureux de pouvoir collaborer avec d’autres ONG spécialisés dans ce domaine.

Nous appelons les grandes sociétés d’Internet comme Google, Yahoo, Microsoft, Facebook à refuser de collaborer avec le régime si ce dernier leur demande l’identité des internautes.

2/ Sur le plan judiciaire

Comme j’ai l’occasion de l’évoquer précédemment, le Vietnam utilise son arsenal juridique pour réduire au silence l’opposition. Nous soutenons l’initiative de certains avocats vietnamiens qui dénoncent les graves manquements du système judiciaire vietnamien et de son absence d’indépendance vis-à-vis du pouvoir exécutif.

Le code pénal vietnamien doit être réformé et certains articles liberticides doivent être retirés comme l’article 88 (propagande contre l’état et le parti). Ce genre d’article n’existe que dans les pays où la liberté d’expression n’existe pas. Les pays dictatoriaux comme le Vietnam s’en servent pour arrêter arbitrairement toute personne qui s’oppose à leur politique.

Et dire que le Vietnam voudrait poser sa candidature pour devenir membre du Conseil des droits de l’homme. Quelle ironie ou plutôt quelle tragédie ! Car avant même de s’inscrire, il lui faut en tout premier lieu garantir à son propre peuple tous les droits basiques d’une société respectueuse des droits humains dont les droits à la liberté d’expression, d’association et à l’égalité devant la justice.

Suite aux révolutions accomplies avec succès en Tunisie et en Egypte, nous attendons la vague de démocratie arriver en Asie. Des voix impatientes ont déjà lancé des appels à la manifestation.

Les actions que mènent les ONG de défense des droits de l’homme comme celles ici présentes, sont essentielles car elles contribuent à renforcer le mouvement démocratique vietnamien, pour qu’un jour prochain, des conditions soient propices à une Révolution au Vietnam.

Je vous remercie pour votre attention.

Nguyen Thi Thanh Van

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