Interview de Nguyen Vu Binh par la radio Nouvel Horizon

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Interview du journaliste dissident Nguyen Vu Binh le 12 juin 2007, 3 jours après sa libération, par la radio Chân Trời Mới (Nouvel Horizon).

La radio Chân Trời Mới est la voix officielle du parti Viêt Tân au Viêt Nam. Depuis 1992, elle émet une heure de programme radiophonique quotidiennement vers le Viêt Nam, de 20h30 à 21h30 sur la fréquence AM 1503 Khz.


Nguyen Vu : M. Nguyen Vu Binh, au nom des auditeurs de la radio Nouvel Horizon, nous vous présentons nos félicitations d’avoir quitté la « petite prison » pour entrer dans la « grande prison. » A ce propos, le journal Nhân Dân (le Peuple), un journal officiel du Parti Communiste Vietnamien (PCV) a écrit : « L’amnistie de Nguyen Vu Binh est due aux principes humanistes et à l’indulgence du Parti Communiste et de l’État. » Que pensez-vous de ces propos ?

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Nguyen Vu Binh

Nguyen Vu Binh : Ce sont les propos habituels du régime lorsqu’il doit libérer des prisonniers d’opinion. Je ne suis pas surpris par cette rhétorique déjà entendue maintes fois et je ne pense pas qu’il faille s’y attarder davantage.

NV : Durant la précédente vague d’amnistie du 2 septembre 2006 [fête nationale du Viêt Nam], des rumeurs prétendaient que votre nom figurait sur la liste des prisonniers graciés. Mais votre libération n’a pas eu lieu car vous auriez refusé de reconnaître publiquement d’avoir enfreint les lois. Pouvez-vous nous confirmer cela ?

NVB : Ce n’était que des rumeurs dont je n’ai pris connaissance que récemment. Je n’ai pas rencontré les autorités durant cette période. Les officiels du régime m’ont beaucoup interrogé en 2004 et en 2005. Ils m’ont dit que si je reconnaissais ma faute, alors ils étudieraient la possibilité d’une remise de peine. Mais à chaque fois, je suis resté sur mes positions en affirmant que je n’avais jamais enfreint les lois. Après cette période, aucun d’entre eux ne m’a rendu visite, jusqu’à ce que je tombe gravement malade en 2007.

NV : Depuis votre retour, est-ce que les autorités vous ont imposé des consignes particulières ? Car, en principe, vous être encore assigné à résidence pendant 3 ans.

NVB : Depuis que la sûreté publique m’a ramené près de mon domicile, je ne les ai pas revus. Mais je dois encore me présenter à la mairie pour régulariser mes papiers. Je pense qu’à ce moment là ils me signifieront mon assignation à résidence.

NV : M. Binh, au cours d’une interview donné à Radio Free Asia (RFA), vous avez réaffirmé que nous n’aviez enfreint aucune loi vietnamienne et que vos convictions n’ont pas changé. Pouvez-vous nous parler davantage de ces convictions ?

NVB : Au Viêt Nam, il y a des choses uniques au monde. Il y a au Viêt Nam des gens qui enfreignent les lois mais qui n’ont commis aucune faute. Je prends l’exemple des personnes condamnées pour « propagande contre l’État. » Les lois vietnamiennes n’ont été faites que pour protéger la dictature du Parti Communiste. Ceux qui veulent la démocratie sont obligés d’enfreindre ces lois. C’est pour cela que je dis que ces gens ont sans doute enfreint les lois mais qu’ils ne sont pas fautifs. Concernant mon cas personnel, je n’ai pas enfreint les lois car on m’a accusé d’espionnage. En revanche, d’autres personnes, beaucoup d’autres, commettent des fautes au grand jour mais sans enfreindre les lois. Eh oui, au Viêt Nam, il y a des choses assez drôles comme cela.

NV : Quoiqu’en disent les autorités vietnamiennes, sous la pression internationale, en particulier celle des États-Unis, elles ont dû vous libérer et elles s’apprêtent sans doute à libérer deux autres dissidents. Cependant, le régime communiste se sert des dissidents comme d’une monnaie d’échange, pour ne pas dire comme d’otages, pour assurer la réussite du voyage du président vietnamien Nguyen Minh Triet aux États-Unis. Avez-vous des remarques à faire sur cette « prise en otage » des dissidents ?

NVB : Je partage également ce sentiment mais je n’ai pas encore une opinion précise sur le sujet car je manque d’informations. Cela ne fait que 3 jours que je suis libre et je dois combler ce grand manque d’informations.

NV : Au cours de l’interview donnée à RFA, vous avez déclaré être très heureux de l’état actuel du mouvement démocratique au Viêt Nam. Comparé à la situation d’avant votre emprisonnement, vous déclarez que ce mouvement est dix fois plus puissant maintenant qu’il y a 5 ans. Pouvez-vous étayer vos propos ?

NVB : Une partie des informations que j’ai reçues concernant les dissidents proviennent des médias officiels du régime comme le journal Nhân Dân ou bien la télévision publique. C’est ainsi que j’ai appris l’existence de nombreux partis politiques, organisations, alliances qui se sont créés récemment au Viêt Nam. C’est un très grand changement par rapport à avant. C’est dommage que certains d’entre eux aient été arrêtés car j’aurais bien voulu m’entretenir avec ces nouveaux militants pour la démocratie. Pour résumer, je dirais que la situation a radicalement changé.

NV : La vague actuelle de répression contre les militants, considérée comme la pire depuis ces 20 dernières années, crée beaucoup de difficultés au mouvement démocratique. Pensez-vous que ce mouvement va décliner dans les mois à venir ?

NVB : Je ne saurai pas répondre à cette question tant que je n’aurai pas actualisé totalement mes informations sur le mouvement démocratique. On ne peut pas affirmer que le mouvement serait en déclin ou, à l’inverse, qu’il serait en progression, si on n’a pas un certain nombre d’informations en sa possession. Ces éléments me manquent pour l’instant car je viens tout juste de sortir de prison. Je vous répondrai lorsque je serai mieux informé sur la situation.

NV : Sans doute le savez-vous déjà, dans moins d’une semaine Nguyen Minh Triet se rendra aux États-Unis avec une délégation nombreuse. Les observateurs prédisent qu’il sera accueilli par de nombreuses manifestations de la communauté vietnamienne en Amérique du Nord pour dénoncer les violations des droits de l’homme perpétrées par les autorités vietnamiennes. Avez-vous des suggestions à formuler à l’adresse des vietnamiens de l’étranger ?

NVB : Je n’ai pas vraiment de suggestions car étant à l’intérieur du Viêt Nam, je ne sais pas très bien comment les vietnamiens de l’étranger militent pour la démocratie. Je dis seulement ceci : quoique vous fassiez, faîtes avancer efficacement la démocratisation du Viêt Nam et que notre peuple connaisse très vite la liberté.

NV : Pour finir, avez-vous un message à transmettre à nos auditeurs ?

NVB : Je voudrais remercier sincèrement tous ceux qui se préoccupent de la situation des droits de l’homme et qui agissent pour qu’elle s’améliore. Ces personnes se sont beaucoup impliquées pour que je retrouve la liberté. Par ailleurs, je dis solennellement aux compatriotes de l’intérieur comme à l’étranger que je suis toujours le Nguyen Vu Binh de 2002. En outre, en 5 ans de prison, j’ai mûri mes convictions sur la situation de notre pays et de notre peuple.

NV : Au nom des auditeurs de la radio Nouvel Horizon, je vous remercie pour cette interview et je vous souhaite de réussir dans le combat commun pour la démocratisation du Viêt Nam.

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