Des anniversaires gênants au Vietnam

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Au siècle dernier, des générations d’écoliers français ont grandi en apprenant de ne jamais oublier l’Alsace-Lorraine, territoires que la France a perdus dans la guerre de 1870-1871 face à la Prusse. Des étudiants chinois ont lancé un mouvement de protestation en 1919 lorsque le Traité de Versailles a accordé au Japon la péninsule de Shandong, lieu de naissance de Confucius.

Pour nombre de Vietnamiens aujourd’hui, Hoang Sa (Paracel) et Truong Sa (Spratly), des archipels au large de la côte est du Vietnam évoquent le même genre d’émotions. Ces chaînes d’îles, dont la propriété est contestée par plusieurs pays, mais principalement occupés par la Chine et le Vietnam, ont été revendiquées par des dynasties impériales Vietnamiennes au cours des siècles passés.

Ils chevauchent des voies maritimes stratégiques dans la mer de Chine méridionale et sont soupçonnés de receler d’importants gisements de pétrole et de gaz. Récemment, la Chine a renouvelé l’affirmation de sa souveraineté sur l’ensemble de la mer de Chine du Sud – les eaux entre le Vietnam et les Philippines, et qui s’étendent vers le sud jusqu’à l’Indonésie – enflammant les passions nationalistes au Vietnam. Dans le même temps, la timide réaction de Hanoi face à la position de Beijing a suscité l’indignation populaire à l’intérieur du pays comme dans la diaspora.

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Bien que tous les Vietnamiens, y compris les communistes au pouvoir, sont tout à fait conscient des siècles de domination par leur grand voisin du Nord, le régime de Hanoi est en conflit sur la façon de traiter avec Beijing. Le gouvernement vietnamien s’appuie sur la Chine pour son soutien politique, photocopiant le modèle chinois de l’ouverture économique et fermeture politique. Il est peu enclin à critiquer ouvertement la Chine, craignant que cette critique vaut une condamnation à terme de lui-même.

Pour un parti qui est arrivé au pouvoir au nom de l’indépendance nationale, la légitimité du Parti communiste vietnamien risque de s’évaporer si les gens réalisent comment il place l’intérêt du régime avant celui de la nation. Dans une culture où l’histoire compte beaucoup, on approche de trois importants anniversaires qui inquiètent les dirigeants communistes du Vietnam.

Honteuse concession

Il y a cinquante ans, la République populaire de Chine a publié une déclaration affirmant que l’ensemble de la mer de Chine du Sud était son un lac intérieur. Quelques jours plus tard, le 14 Septembre 1958, le Premier ministre du Nord-Vietnam Pham Van Dong a envoyé un courrier diplomatique à son homologue Zhou EnLai, approuvant la déclaration chinoise. La motivation des communistes de Hanoi était simple : ils avaient besoin du soutien militaire de la Chine dans la guerre contre le Sud-Vietnam soutenu par les États-Unis.

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Toutefois, les communistes de Hanoi ont donné ce qui n’était pas en leur possession. Les Accords de Genève de 1954 ont divisé le Vietnam au niveau du 17ème parallèle. Aussi bien les Paracels et que les Spratley sont situés au-dessous du 17ème parallèle et appartenaient légalement au Vietnam du Sud. À ce jour, Beijing utilise le courrier de Pham Van Dong pour appuyer ses revendications sur les archipels. Ce document, qui n’a jamais eu aucune force juridique, est publié sur le site du ministère des Affaires étrangères de la Chine dans le cadre d’un article intitulé « La reconnaissance internationale de la souveraineté de la Chine sur les îles Nansha (Spratly). »

Comme le 50ème anniversaire de la concession de Pham Van Dong approche, des militants au Vietnam exigent que le gouvernement de Hanoi dénonce officiellement ce courrier diplomatique. Il s’agit d’un débat public que les autorités ne souhaitent pas s’installer et il reste à voir quelle sera la réaction officielle. Si les dirigeants ne tiennent pas compte, ou pire encore, répriment ces aspirations, cela confirmera une hypothèse qui se répands de plus en plus selon laquelle les communistes de Hanoi ont été complices dans la cession des îles vietnamiennes à la Chine.

En novembre 2007, la Chine officialisa son annexion des Paracels et Spratlys en intégrant les deux archipels dans une nouvelle unité administrative (connu sous le nom de « Tam Sa ») régie par la province de Hainan. Lorsque cette décision a été connue, des étudiants vietnamiens et des bloggers ont organisé des protestations sans précédent devant les représentations diplomatiques chinoises à Hanoi et à Saigon. Ces protestations se sont déroulé sur deux week-ends consécutifs jusqu’à ce que la police vietnamienne harcèle et arrête de nombreux organisateurs.

Comme le premier anniversaire de l’incorporation de Tam Sa approche, les jeunes Vietnamiens pourraient de nouveau descendre dans les rues. Cette fois, est-ce que le gouvernement fermera les blogs et emprisonnera les personnes qui défendent la souveraineté territoriale du Vietnam ? L’année dernière, Hanoï est devenu un membre du Conseil de Sécurité de l’Organisation des Nations Unies. Nombreux sont ceux qui se demandent si Hanoi utilisera son confortable siègle pour plaider en faveur d’un règlement international du différend en mer de Chine méridionale.

Les sacrifices du passé

Vers la fin de la guerre du Vietnam, la Chine a profité de l’affaiblissement de la position militaire du Sud-Vietnam pour s’attaquer aux archipels Paracel, où était cantonnée une garnison de troupes vietnamiennes. Dans la bataille navale du 19 janvier 1974 et les débarquements amphibies chinois, 53 marins et soldats vietnamiens ont perdu la vie en défendant ces îles. Le gouvernement de Saigon a protesté contre cette invasion non provoquée, alors que le gouvernement de Hanoi a exprimé son soutien à l’action de la Chine contre ceux qu’elle appelle « les marionnettes de l’Amérique. »

Aujourd’hui, près de 35 ans plus tard, alors que la vieille propagande s’estompe, une évaluation équitable de l’histoire révèle une vérité qui dérange les dirigeants communistes à Hanoi. Au cours de la plupart des jours difficiles de la guerre civile du pays, le Sud, que les communistes ont toujours vilipendé, a vaillamment lutté pour conserver une partie de la patrie. Ceci contraste avec le manque de vision du Nord qui s’est félicité de l’occupation chinoise des Paracels pour servir son objectif militaire de court terme.

Dans les coutumes vietnamiennes, les ancêtres et les héros nationaux sont vénérés. Quelque 35 ans après la bataille des îles Paracel, les bloggers et les historiens au Vietnam commencent à revoir l’histoire. Cela crée un autre dilemme pour le régime : va-t’il empêcher les citoyens de débattre publiquement du passé ? Comment les autorités vont réagir face à des cérémonies du souvenir pour les 53 marins et soldats sud-vietnamiens qui sont morts au combat ?

Deux conflits, une solution

Il y a vraiment deux conflits entremêlés découlant de la dispute sur les îles de la mer de Chine méridionale. Le premier conflit est entre la Chine, le Vietnam et d’autres pays ayant un intérêt dans la résolution de la dispute.

La soif de Beijing pour l’approvisionnement en énergie et le désir d’acquérir une importance mondiale l’ont conduit à adopter une position de plus en plus agressive, menaçant la liberté de navigation, les droits de pêche et les contrats d’exploration de l’énergie. La question de la mer de Chine du Sud doit être soulevée au niveau des instances régionales et internationales où une solution pacifique acceptable pour toutes les parties puisse être atteinte.

Le deuxième conflit est entre les dirigeants du Vietnam et son peuple. Parce que les intérêts des deux ne sont pas nécessairement alignés, la manière d’aborder le problème diffère entre Hanoi et un nombre grandissants de Vietnamiens. Tout comme au niveau international, il est nécessaire d’avoir un débat libre et ouvert au sein Vietnam en ce qui concerne l’histoire des Paracels et des Spratlys ainsi que sur les moyens de résoudre les revendications du Vietnam.

La question de ces îles peut être explosive, et les dirigeants à Hanoi le savent. Au cours d’une réunion cet été, le Comité central du Parti communiste a débattu du mécontentement croissant parmi les étudiants et les intellectuels et de la façon de répondre à l’agressivité du gouvernement chinois, en vain.

La solution du problème de la mer de Chine méridionale est ouverte, un dialogue franc sur le plan international et au sein du Vietnam. Le régime de Hanoi doit être prêt à soulever cette question dans les instances internationales et le peuple vietnamien doit avoir le droit d’exprimer librement son point de vue sur cette question d’importance nationale.

L’échec du Parti communiste à défendre la souveraineté territoriale du Vietnam et son insistance à réprimer les expressions du patriotisme à l’intérieur soulève la question de la légitimité même de son pouvoir.

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