Le “village du cancer”, face noire de l’industrialisation du Vietnam

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01/12/2008

THACH SON (AFP) — Quand une usine d’engrais s’est installée à Thach Son en 1962, le paysage de bambous et bananiers s’est vite transformé, se souvient Quang Van Vinh. Le lieu, devenu “le village du cancer”, symbolise aujourd’hui la face noire de l’industrialisation du Vietnam.

L’ancienne maison de cet habitant de 62 ans n’existe plus. Trop proche de l’usine Lam Thao, elle a été rasée comme de nombreuses autres. Le terrain qu’elle occupait abrite aujourd’hui des fours à brique.

“C’est triste, il n’y a presque plus de trace de vie ici”, glisse Vinh.

Très vite après sa construction, l’usine a déversé ses eaux usées dans les cours d’eau et rizières. Le ciel s’est rempli de fumées noires.

“On pouvait partout sentir la fumée de l’usine”, raconte-t-il. “Les gens ont commencé à tousser. Tous ces arbres sont morts. Les habitants ne savaient pas pourquoi. Et puis les autorités nous ont tous déplacés il y a à peu près 15 ans”.

Vinh raconte que son fils est mort d’un cancer de la gorge en 2000, à 23 ans. Le père n’a pas de preuves, mais il n’a aucun doute sur la cause du décès : “Je pense vraiment que mon fils est mort du cancer à cause de la pollution industrielle”.

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Photo : AFP

Selon Le Van Ton, chef du dispensaire local, les décès dus au cancer dans la commune de 7.000 habitants ont grimpé presque tous les ans depuis une décennie – de trois en 1999 à 15 l’an dernier. “La plupart des victimes du cancer dans notre commune vivaient dans des zones proches de l’usine”, lâche-t-il.

Il y a quelques années, Thach Son a fait les titres de la presse vietnamienne, taxé de “village du cancer”. Des responsables gouvernementaux sont venus, ont prélevé des échantillons d’eau et regardé les statistiques, explique Nguyen Van Thang, vice-président du comité populaire (mairie) de ce village du nord Vietnam.

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Photo : AFP

Puis ils sont repartis, poursuit-il, et la population n’a plus entendu parler d’eux.

Comme de nombreux pays développés, le Vietnam communiste a opté pour une industrialisation rapide, qui a apporté une prospérité certaine, mais a déjà aussi fait de nombreux dégâts.

Le pays recense désormais des centaines de parcs industriels, des milliers d’usines et moins du tiers de leurs déchets liquides sont traités avant d’être relâchés dans la nature, reconnaît le gouvernement.

Dans les grandes villes, la capitale Hanoï au nord et Ho Chi Minh-Ville (ex-Saïgon) au sud, de nombreux cours d’eaux se sont transformés en égouts à ciel ouvert.

Aujourd’hui, les autorités semblent avoir pris conscience qu’elles ne pouvaient plus ignorer le problème. Elles ont commencé à hausser le ton contre de grands pollueurs, montrant une volonté d’agir nouvelle mais qui montre aussi ses limites.

Début septembre, l’entreprise taïwanaise d’additifs alimentaires Vedan s’est notamment retrouvée sous le feu des critiques, accusée de déverser quelque 100.000 mètres cubes d’effluents non traités par mois dans la rivière Thi Vai, au sud, via des canalisations cachées.

Les habitants s’en plaignaient depuis des années, mais le gouvernement n’a bougé que quand des entreprises ont menacé de ne plus stationner leurs bateaux dans le port voisin. L’eau polluée était devenue trop corrosive pour les coques.

En octobre, le ministère de l’Environnement a ordonné à l’usine d’arrêter ses pratiques, mais les responsables provinciaux ont reconnu avoir peu d’autorité pour faire pression sur elle.

Le Premier ministre, Nguyen Tan Dung, a lui-même récemment reconnu le dilemme du Vietnam, contraint de protéger son environnement, mais, dans le cas de Vedan, obligé aussi de penser aux milliers d’emplois en jeu.

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