Le Vietnam applique le modèle chinois pour réprimer blogueurs et internautes

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13 février 2013

Par François Bougon

Face à la multiplication des blogs et la popularité des réseaux sociaux, le régime communiste vietnamien s’inspire du puissant voisin chinois pour réprimer les voix dissidentes dans un pays où plus du tiers de la population est connectée (31 millions d’internautes). Dans un rapport publié mercredi 13 février, le Comité vietnamien pour les droits de l’homme dénonce la répression croissante envers les blogueurs depuis 2010 sous le prétexte de “violations de la sécurité nationale”. Au total, au moins 33 personnes ont été condamnées ou sont dans l’attente de leurs procès, sous l’accusation d’avoir utilisé la Toile pour mettre en cause le parti communiste vietnamien. Selon Reporters sans frontières, le Vietnam est “la deuxième prison du monde pour les net-citoyens, derrière la Chine”.

ESPACE D’EXPRESSION

Les blogs “fournissent un espace unique au Vietnam du parti unique, où la société civile, la presse, les mouvements religieux et les syndicats sont muselés par le contrôle omniprésent du parti communiste”, souligne le rapport du Comité vietnamien pour les droits de l’homme. Depuis deux ans, explique-t-il, un “journalisme citoyen” dénonce les scandales de corruption, les abus de pouvoir, le népotisme au sein de l’élite, les atteintes à l’environnement et les expropriations de terres par les autorités.

L’un des sites Internet les plus populaires, qui aborde des sujets tabous dans la presse officielle, est DanLamBao. Il fait partie des trois blogs qui ont été visés spécifiquement en septembre 2012 par le premier ministre Nguyen Tan Dung. Ce dernier les a accusés de “publier des informations déformées et fabriquées” sur les dirigeants et d’”inciter les gens à s’opposer au parti et à l’Etat”. Des articles publiés par ces sites avaient fait état d’une lutte au sein du pouvoir après l’arrestation d’un des banquiers vietnamiens les plus influents. Mais DanLamBao a répondu sur son site en publiant une “Lettre ouverte au premier ministre” :

“Aucun gouvernement ou parti politique n’a le droit de choisir pour le peuple l’information qu’il peut lire, écouter ou échanger. DanLamBao continuera à fournirde l’information et des points de vues diversifiés (…) et à créer un forum où les lecteurs nous font part de leurs informations, présentent leurs propres perspectives sur des sujets qui affectent leurs vies. De plus, DanLambao ne prendra partie pour aucune des factions du parti et ne permettra pas d’être influencé par une quelconque force ’étrangère’ ou ’hostile’ – comme nous a accusé de le faire le premier ministre. Nous rejetons l’influence de n’importe quelle puissance ou élite. Nous servons la nation. Sur le long terme, nous sommes persuadés que les médias vietnamiens changeront – ils ont déjà changé dans une certaine mesure – et nous sommes fiers de notre rôle dans cette évolution”.

Les tentatives d’intimidation ont eu un effet contraire, lui permettant de doubler son audience. Les responsables du site continuent cependant à travailler, anonymement, dans la crainte de la répression. Un autre site influent est Bauxite Vietnam, créé par des intellectuels de Hanoi, Nguyen Hue Chi, Pham Toan etNguyen The Hung. Le nom s’explique par leurs critiques des projets chinois pour l’exploitation des mines de bauxite dans le pays.

ARSENAL JURIDIQUE

Le pouvoir vietnamien s’est doté d’un arsenal juridique pour lutter contre les cyber-opposants et d’une “cyber-police” au sein du ministère de la sécurité publique, souligne le rapport intitulé Blogueurs et Internautes citoyens derrière les barreaux. Si la loi controversée sur un contrôle renforcé du Net n’a pas encore été adoptée et est actuellement bloquée au parlement, un nouveau décret issu du cabinet du premier ministre Nguyen Tan Dung prévoit, à partir de juillet 2013, de fortes amendes pour ceux qui publieraient sur “l’Internet du matériel qui est faux, incompatible avec les intérêts de l’Etat ou avec les traditions et coutumes du Vietnam”.

Les blogueurs sont généralement poursuivis dans le cadre de l’article 88 du code pénal prévoyant des peines de 3 à 20 ans de prison pour “propagande contre la République socialiste du Vietnam”. Les croyants sont souvent détenus dans le cadre de l’article 87 sous l’accusation de “saper la solidarité nationale, semer les divisions entre les croyants et non-croyants”. “Depuis 2010, souligne le rapport, plusieurs militants pro-démocratie pacifiques qui se sont servis de l’Internet pourdiffuser leurs appels à la réforme ont été inculpés dans le cadre de l’article 79 pour subversion ou ’activités destinées à subvertir le pouvoir du peuple’, qui prévoit la peine de mort comme jugement maximal”. Le 9 janvier 2013, un groupe de 14 blogueurs et militants a ainsi été condamné à un total de 113 années d’emprisonnement.

Tout comme Pékin, Hanoi a choisi de soutenir l’Internet comme vecteur de croissance économique tout en maintenant le contrôle et la censure pour éviter qu’il ne se transforme en plateforme de contestations politique. Tout comme Pékin, le Vietnam a commencé à recruter des centaines de blogueurs pour contrecarrer les “forces hostiles en ligne”.

Source : Le Monde

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