Comment entreprendre au Vietnam s’est révélé être une aventure coûteuse

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Hanoi peut être impitoyable envers les investisseurs étrangers ; l’épreuve de l’emprisonnement d’un homme.

Par James HOOKWAY
14 Août 2007

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[HANOI ; Vietnam] Quand, 10 ans plutôt M. Hoan Nguyen, un homme d’affaire américain est arrivé au Vietnam avec le projet de construire une Ecole Internationale, il avait les yeux « brillant d’espoir » pour son pays natal, dit-il.

Mais, au cours de l’année passée il se retrouva étendu sur un banc détrempé de la prison B14 à Hanoi, à la suite d’un conflit commercial avec ses partenaires gouvernementaux vietnamiens. Conflit qui a conduit à une enquête policière dont M. Nguyen était le principal suspect.

Les malheurs de M. Nguyen mettent en évidence l’un des grands risques pour les étrangers, arrivés en masse, pour investir au Vietnam dont l’économie augmente de plus de 8% par an. Economie largement considérée comme le marché émergeant le plus attrayant après la Chine et l’Inde. Ils montrent aussi comment les bureaux et agences gouvernementales vietnamiennes peuvent parfois employer des méthodes redoutables pour obtenir ce qu’ils veulent lorsqu’un marché tourne mal.

Emprisonné durant 14 mois, tandis que les enquêteurs fouillaient son cas, M. Nguyen entendait gronder chaque matin dans la cour de la prison, la radio d’Etat vietnamienne qui exhortait les Vietnamiens d’Outre-mer à rentrer pour alimenter la fulgurante croissance économique du pays.

« C’était si ironique. J’ai fait exactement ce que le Gouvernement voulait et j’ai fini en prison » dit M. Nguyen, cet homme de 58 ans, relâché en juin et qui attend maintenant la conclusion à son cas.

Durant son emprisonnement, M. Nguyen dit qu’il n’a eu le droit de rencontrer un avocat qu’à 2 reprises. Il prétend en outre avoir été un jour battu par un agent de police. La nourriture était peu copieuse. Pour le nouvel an vietnamien, il a eu droit à un petit morceau de poulet avec son unique portion de riz quotidienne. Les représentants de la police ont refusé tout commentaire quant aux conditions de détention de ce dernier.

Alors que M. Nguyen a passé 14 mois derrière les barreaux et que sa famille a payé une soi-disant caution de 85 000 dollars, la police vietnamienne a conclu dans un rapport initial qu’il n’y avait pas de preuve suffisante pour poursuivre M. Nguyen et l’a libéré. La caution n’a pas été restituée. M. Nguyen attend toujours que le Ministère Public vietnamien décide officiellement s’il l’inculpe d’une quelconque infraction.

Après des décennies d’administration communiste, la législation vietnamienne est encore mal équipée pour se charger des conflits commerciaux civils qui sont habituellement pris en main par des médiateurs indépendants dans les autres pays où l’économie de marché est bien établie.

Ainsi, faute de pouvoir recourir à un tribunal civil, les plaignants peuvent déposer leurs griefs directement auprès de la police qui peut enfermer des suspects pendant des mois sans détenir de charges contre ces derniers. Dans d’autres cas, le Gouvernement a usé de son autorité pour saisir des entreprises privées, laissant peu d’espoir à leur propriétaire d’obtenir réparation devant la cour.

Tony Foster, le directeur associé du cabinet vietnamien de la société Freshfields Bruckhaus Deringer basée au Royaume Uni dit que l’une des caractéristiques du code pénal vietnamien -un imbroglio de lois locales et étrangères- est que la criminalité y est décrite de manière floue et est donc facilement applicable dans un contexte commercial.

Une « mauvaise gestion économique » aboutissant à des pertes pour l’Etat est considéré comme un de ces crimes. M. Foster fait savoir qu’une entreprise étrangère engagée dans une joint-venture avec une agence d’état pourrait être poursuivie pour crime si elle bute sur une simple démarche administrative dans le cas où il y aurait des intérêts politiques en jeu.

Le Président Vietnamien Nguyen Minh Triet a reconnu dans une récente interview que son pays avait besoin de modifier sa législation pour se rapprocher des systèmes légaux internationaux. Mais les gens qui connaissent bien les efforts de réformes du Vietnam affirment que cela prendra beaucoup de temps. Débutée il y a plusieurs années, la conduite des réformes se concentre, entre autres choses, à aplanir le terrain de jeux entre les hommes d’affaires locaux et étrangers.

En attendant, les conflits commerciaux et les violations de la réglementation traités comme des crimes continuent de s’accumuler.

L’année dernière, 4 employés locaux de la filiale au Vietnam de la banque allemande, ABN Amro Holding NV, ont été arrêtés quand la police vietnamienne les a accusés de mener une série de transactions sur le marché des changes avec un employé non habilité de la banque d’Etat. Marchés qui ont fait perdre au Gouvernement 5 millions de dollars. L’ABN Amro a versé au Gouvernement vietnamien la somme de 4,5 millions de dollars en Novembre pour obtenir la libération de son personnel. Les 4 banquiers sont maintenant libres de travailler et voyager dans le pays. Mais l’enquête sur le travail du personnel de l’ABN Amro suit toujours son cours. Au préalable, un porte-parole de l’ABN Amro a réfuté tout méfait imputé à ses employés au Vietnam.

D’autres banques étrangères ont protesté, dans une lettre au Gouvernement, contre les actions de la police. Elles se plaignent du fait que la loi vietnamienne permet trop facilement l’incrimination dans ce qui ne sont que de simples querelles civiles.

Les expatriés d’origine vietnamienne, qui sont rentrés pour accompagner le pays dans sa démarche de transition d’une économie centrale planifiée vers une économie de marché, sont moins bien considérés que les investisseurs étrangers. Beaucoup, M. Nguyen compris, se plaignent que leur situation légale est compromise car l’Etat répugne à les considérer comme des étrangers, bien qu’ils soient citoyens d’autres pays. Ainsi, selon les personnes qui ont suivi la situation de près, l’une des raisons pour laquelle la police a maintenu M. Nguyen en prison pendant plus d’un an, était qu’elle enquêtait sur la perception par ce dernier d’une assurance médicale réservée aux employés étrangers de l’Ecole Internationale de Hanoi (école qu’il a aidé à construire). Or, la police a négligé le fait que M. Nguyen était citoyen américain.

De toute évidence, quelques Vietnamiens d’Outre-mer (ou Viet-Kieu), dans leur tentative pour faire fortune semblent se moquer des lois du pays, discréditant ainsi ceux qui sont rentrés pour s’engager dans un business légal/des affaires honnêtes. C’est le cas bien connu d’un homme d’affaire français, M. Nguyen Gia Thieu qui avec de frère, ont crée une entreprise de vente de téléphones portables de marque Nokia et Samsung. En 2003, la police a arrêté M. Thieu en affirmant que ce dernier importait clandestinement des téléphones pour ne pas avoir à payer les taxes d’importations. Plus tard, il fut reconnu coupable et condamné à 20 ans de prison.

M. Nguyen, cependant, se bat toujours pour laver son nom.

M. Nguyen Dinh Hoan, un homme dynamique avec une abondante chevelure grise, diplômé des Universités de Vanderbilt et Georges Manson aux Etats-Unis, a quitté le Vietnam dans les années 60 et n’y est jamais retourné depuis des décennies à cause de la guerre et de l’agitation politique. Comme beaucoup de Viet-Kieu, il a inversé l’ordre de son nom pour suivre les pratiques occidentales. Il est connu aujourd’hui comme étant M. Hoan Nguyen.

En 1995, il est finalement retourné au Vietnam avec le projet de créer une Ecole Internationale pour accueillir les familles d’expatriés étrangers qui étaient revenus en masse au Vietnam. M. Nguyen a fondé cette école en partenariat avec le Centre Gouvernemental pour l’Education vietnamien en 1996. Le gouvernement a fourni 20% du bail sur la valeur du terrain situé dans le centre ville de Hanoi, un secteur en plein essor contre 30% des parts dans l’entreprise.

Comme la valeur du terrain sur lequel l’école a été construite a augmenté, les tensions entre M. Nguyen et ses partenaires se sont multipliées. En avril 2006, dans le cadre des enquêtes menées parmi les partenaires du Gouvernant, M. Nguyen a été arrêté par la police qui affirme d’une part que ce dernier percevait illégalement une assurance médicale, et d’autre part en soutenant faussement dans son rapport qu’il avait embauché un assistant personnel afin de l’aider dans un business annexe d’enseignement de l’anglais.

Alors que M. Nguyen était en prison, des membres de la famille rapportent que des fonctionnaires de l’ambassade américaine ont dissuadé sa femme de se rendre au Vietnam pour aider à sa libération, car ils ne pouvaient pas garantir sa sécurité.

M. Ho Ngoc Dai, ancien directeur du Centre Gouvernemental pour l’Education, l’ancien partenaire de l’Ecole, et gendre d’un ancien chef du Parti Communiste a qualifié M. Nguyen de « voleur », mais il s’est refusé à toute explication sur la certitude qu’il avait que celui-ci était un criminel, et à en dire davantage.

M. Nguyen maintient qu’il n’a rien fait de répréhensible – et que le versement du salaire de son assistant était divisé entre lui l’école et lui-même.

En Juin, après la libération de M. Nguyen, son dossier a atterri sur le bureau du Premier Ministre vietnamien, Nguyen Tan Dung, un ancien patron de la Banque Centrale, qui a la réputation d’être un franc-tireur. Ce dernier a chargé les membres vietnamiens du conseil de l’école de résoudre leurs conflits avec M. Nguyen. A défaut de solution, c’est le Gouvernement qui imposera sa solution selon le journal d’état Công An Nhân Dân (Police du Peuple).

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