La corruption sape le programme de relance du Vietnam

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Par Martha Ann Overland / Hanoi

Alors que les gouvernements du monde entier déversent des milliers de milliards de dollars pour stimuler la consommation et lutter contre la récession mondiale, le débat fait rage sur la question de savoir si cette inondation d’argent permettra d’offrir plus qu’une relance économique à court terme et si, en fin de compte, une grande partie de cet argent ne va pas être gaspillée. Le Vietnam, comme la plupart des pays asiatiques, est frappé par le ralentissement de l’économie. Il est en train de découvrir que même la relance de la consommation par la voie la plus directe – sous forme de cadeaux en espèces pour les citoyens – peut se retrouver dans de mauvaises mains.

Avec un nombre croissant de pauvres dont certains crient famine, les fonctionnaires communistes de Hanoi ont récemment décidé de verser 12 dollars à des millions de Vietnamiens, à la veille de la plus importante fête de la nation, le Têt, le Nouvel An vietnamien. Le Têt au Vietnam est l’équivalent de Noël, c’est un jour férié, de réunions familiales et de dépenses somptuaires en cadeaux. Mais cette année, le temps du don est devenu le temps du vol. Il semble que beaucoup d’enveloppes d’argent destinées à être distribuées ont été détournées par des fonctionnaires locaux corrompus.

Selon la police locale, dans certains cas, des frais ont été déduits ou bien les dons étaient taxés au point qu’il restait peu d’argent pour le bénéficiaire. Des familles dans la province de Quang Binh se plaignent avoir été obligées de signer des reçus reconnaissant la réception de l’enveloppe dont les villageois disent que plus de 90% de l’argent a été retiré par les petits bureaucrates. Dans la province de Quang Ngai, des dizaines de personnes disent qu’elles ont été forcées à faire un don à une soi-disant campagne d’aide aux pauvres. D’autres villageois démunis ont indiqué qu’ils devaient contribuer à un fonds pour les pauvres avec l’argent reçu. Des enquêtes sur des cas similaires ont commencé dans tout le pays.

À tous les niveaux, les fonctionnaires vietnamiens ont une réputation de corrompus.

Pour bénéficier de ce don inhabituel, il faut vivre en dessous du seuil de pauvreté (défini par le gouvernement à 15 dollars par mois). Les bénéficiaires reçoivent une enveloppe de 200 000 dongs vietnamiens, soit environ 12 dollars. Le don est limité à 57 dollars maximum par foyer. Bien que cela semble être une somme dérisoire, cet argent est une aubaine pour les 10 millions de pauvres du Vietnam. Cela a été un moyen d’aider vraiment les gens qui souffrent de la crise économique et d’une série de catastrophes naturelles qui ont frappé le pays l’an dernier, explique Ngo Truong Thi, la directrice-adjointe de la protection sociale au ministère du Travail, des Invalides et des Affaires sociales, qui a supervisé le programme. « Donner de l’argent aux pauvres entre également dans le cadre des mesures visant à stimuler l’économie », dit-Thi.

Le récent ralentissement économique mondial a freiné la croissance que connait le Vietnam depuis dix ans. Le Fonds monétaire international prévoit que la croissance du PIB vietnamien va ralentir à 5% cette année, contre 8,5% en 2007. Le secteur manufacturier du pays est particulièrement frappé, alors qu’il a aidé à sortir des millions de personnes de la pauvreté en fournissant des emplois relativement bien rémunérés. La baisse des commandes de l’étranger a obligé des usines récemment construites à fermer, et le renvoi de travailleurs dans leur village.

Le programme de relance du Vietnam est bien pâle en comparaison des 787 milliards de dollars approuvé par le Congrès américain la semaine dernière, mais le pays fait ce qu’il peut pour relancer son économie. Le don en espèces fait suite à l’annonce en novembre dernier d’un plan d’un milliard de dollars pour subventionner les prêts aux entreprises et réduire les impôts afin de stimuler l’investissement et créer des emplois. Mais seul, Hanoi ne peut pas changer le cours des événements mondiaux, déclare Alex Warren-Rodriguez, conseiller à la politique économique du Programme des Nations Unies pour le Développement à Hanoi. Le Vietnam est trop dépendant de ce qui se passe aux États-Unis et en Europe. « Même si vous réduisez les taux d’intérêt pour stimuler l’investissement, il ne va rien se produire car il n’y a rien dans quoi investir », dit-il. « La baisse des taux ne peut quasiment pas stimuler l’économie. »

Pourtant, la perception du public sur la façon dont le gouvernement gère la crise est d’une importance cruciale. Vu Thanh Tu Anh, directeur de recherche au Programme d’Enseignement Économique Fulbright à Saigon, dit que les dons en espèces ont été clairement motivés par des raisons politiques, et pas seulement économiques. « Il est très important pour le gouvernement d’être perçu comme faisant quelque chose », dit-il. « La pression politique est immense. »

Jusqu’à présent, Hanoi semble être loin dans ses efforts visant à gagner la confiance du public. Le ministère des Finances a annoncé la relance il y a des mois, mais les mesures n’ont seulement été mises en œuvre que ces dernières semaines, dit Tu Anh. Maintenant, l’image du gouvernement a été ternie, car des fonctionnaires locaux ont volé les gens que Hanoi voulait aider.

On ne connaîtra sans doute jamais quelles sommes d’argent destinées aux pauvres ont été détournées. Un fonctionnaire de la province de Lam Dong, dans le centre du Vietnam, a été arrêté la semaine dernière, et des dizaines d’autres à travers le pays ont été rétrogradés ou licenciés en raison de ce scandale. Des centaines d’enquêtes sont en cours au niveau provincial.

Mais rares sont ceux qui sont surpris par l’ampleur du pillage, dit Tuong Lai, ancien directeur de l’Institut de sociologie de Hanoi, un organisme géré par le gouvernement. À tous les niveaux, les fonctionnaires vietnamiens ont une réputation de corrompus. L’année dernière, une enquête de Transparency International sur la corruption dans le secteur public a classé le Vietnam au 121e rang des pays les plus corrompus sur 180 pays. « Voler les pauvres n’a rien de particulièrement nouveau », explique Lai. « Mais après une année de terribles difficultés, le don du Têt était censé être un geste pour aider à améliorer la confiance du peuple vietnamien ». Au lieu de cela, il a été saboté, fait remarquer Lai.

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