Le Vietnam sur les traces de la Chine

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19 mai 2011

Par Bridget O’Flaherty

Alors que l’attention internationale était concentrée sur les mesures de répression des activistes en Chine, le Vietnam resserrait également son étau sur la dissidence.

Les militants en Chine ne sont pas les seuls à connaître les affres d’un régime communiste totalitaire. Alors que le monde était concentré sur la détention de l’artiste et du militant Ai Weiwei, des dissidents vietnamiens étaient également condamnés à de lourdes peines pour – selon le gouvernement – activités “anti-gouvernementales”.

Le mois dernier, par exemple, un appel a été interjeté par l’un des plus anciens dignitaires jugé pour dissidence. L’ancien membre du Parti communiste Vi Duc Hoi, 54 ans, a été condamné à une peine de cinq ans de prison, assortie de trois années d’assignation à résidence surveillée. Il est vrai que la peine a significativement été réduite comparée à la peine initiale de huit années de prison et cinq années à résidence surveillée. Cependant, Human Rights Watch n’a pas été seule à qualifier cette peine de “très sévère”.

Et le cas de Hoi n’est sûrement pas un cas isolé.

Le mois dernier, l’avocat Cu Huy Ha Vu a été condamné à sept ans de prison suivis de trois années d’assignation à résidence, après avoir été arrêté alors qu’il était dans un hôtel soi-disant en compagnie d’une femme qui ne serait pas la sienne. Son ordinateur portable a été saisi, sa maison perquisitionnée et il a été accusé d’activités anti-gouvernementales. Dans le même mois, Bui Chat, le fondateur de Giay Vun Publishing, a lui aussi été arrêté en rentrant de Buenos Aires où il s’était rendu pour recevoir le Prix Liberté de Publier de l’International Publishers Association (l’Association Internationale des Éditeurs). Il a ensuite été libéré, mais doit faire face à une surveillance constante.

L’année dernière, une blogueuse a été arrêtée après avoir posté un article et décrit le fils d’un haut dirigeant comme coureur de jupons. Elle a finalement été libérée le mois dernier, les autorités ne manquant pas de faire savoir dans la presse locale qu’elle avait été suffisamment “mise en garde”.

On dit souvent que pour tout ce qui touche à la sécurité, le Vietnam suit souvent son grand voisin chinois. Il est certain que Pékin est au centre des mesures de répression – que beaucoup considèrent les plus intenses depuis des années – de peur que le Printemps Arabe ne parvienne jusqu’en Asie. Et pour ceux qui chercheraient des similitudes, le cas de Cu Huy Ha Vu est particulièrement saisissant. Cu Huy Ha Vu est un pur produit du communisme – fils d’un poète célèbre, lui-même proche confident de Ho Chi Minh. Le rapprochement avec le cas du Chinois Ai est troublant. Ai a été arrêté à Pékin alors qu’il se rendait à Hong Kong. Lui aussi est le fils d’un poète célèbre que beaucoup pensait jusqu’ici intouchable.

“La répression ne répondait pas aux besoins du 11ème Congrès du Parti, mais à la nervosité croissante du régime envers le mouvement croissant pour la démocratie et sa blogosphère.”
Duy Hoang, Viet Tan.

Il serait cependant une erreur de trop essayer de relier les évènements du Vietnam à ceux de la Chine. Car, concernant le Vietnam, les mesures de répression intenses “élargies” peuvent effectivement être remontées jusqu’en 2007.

“Cela a commencé après que Hanoï a obtenu ce qu’ils voulaient – son adhésion à l’OMC – et cela continue depuis” dit Duy Hoang, porte-parole de Viet Tan, une organisation pour la démocratie interdite au Vietnam. “La répression ne répondait pas aux besoins du 11ème Congrès du Parti, mais à la nervosité croissante du régime envers le mouvement croissant pour la démocratie et sa blogosphère.”

Jusqu’à mi-janvier, la plupart des récentes mesures de répression étaient perçues comme un peu de ménage avant le Congrès. Le blocage de Facebook (d’abord au hasard en 2009, puis intensifié dans les jours précédant l’événement), les arrestations diverses et même les soi-disant mesures de répression contre la main d’œuvre chinoise illégale, tout était considéré comme faisant partie d’un assainissement pré Congrès. Après tout, le raisonnement était normal : personne ne veut de dissidents posant des questions avant un événement dont le but principal est d’assurer la suprématie du parti unique. En attendant, certains groupes à l’intérieur du Parti communiste étaient déterminés à prouver qu’ils n’étaient pas tendres en matière de sécurité.

Mais la répression a survécu au Congrès.

Il apparait que Vu a rencontré des problèmes après avoir essayé de poursuivre le Premier Ministre en justice sur le plan controversé de l’exploitation de la bauxite au centre du Vietnam et de la cession d’une large bande de terre le long de la frontière sino-vietnamienne. “Tout le monde pense que Vu a été persécuté pour s’en être pris au Premier Ministre” dit Hoang.

Selon le journal Nhan Dan, Vu a été arrêté le 5 novembre de l’année dernière, pour avoir écrit des documents appelant à la démocratie pluripartite et pour avoir accordé des interviews à des médias étrangers. “Ces articles critiquaient pour beaucoup l’État vietnamien et le peuple vietnamien. En enquêtant, les autorités vietnamiennes ont trouvé 40 documents sur différents sujets, notamment un certain nombre d’articles écrits par M. Vu, rejetant la direction du Parti Communiste vietnamien”, a indiqué Nhan Dan.

On espérait que la pression internationale pourrait forcer le gouvernement à mettre fin à cette vague d’arrestations. L’Union Européenne a été particulièrement critique, faisant valoir qu’avec la croissance économique, la liberté d’expression devait suivre. Le soi-disant acte d’accusation de Vu en date du 4 avril “n’est pas en accord avec le droit fondamental à la personne de liberté d’opinion et d’expression”.

Cela intervient alors que la C.E. et le Vietnam étudient actuellement la possibilité de lancer des négociations qui pourraient mener à un accord de libre-échange majeur. L’accord commercial bilatéral Vietnamien signé avec les États-Unis et entré en vigueur en 2001, a été accordé sous condition d’une stimulation de la croissance économique de la nation communiste.

Mais le cas de Vu est susceptible de compliquer le dialogue. Selon l’Union Européenne, “l’amitié entre la communauté internationale et le Vietnam, ainsi que les propres progrès économiques du Vietnam, ne peuvent être durables si l’expression pacifique, notamment concernant les problèmes-clés pour l’avenir du peuple et du pays, est supprimée”.

Les États-Unis, quant à eux, ont exprimé leur “profonde inquiétude” et, avec l’UE, ont déclaré que la condamnation de l’avocat formé en France allait à l’encontre des conventions internationales des droits de l’homme dont le Vietnam est signataire.

Pourtant, alors que les activistes espèrent que le développement d’une société civile au Vietnam favorisera les valeurs démocratiques, certains observateurs se plaignent que les préoccupations des pays étrangers sont rarement étayées par des mesures plus coercitives, telles le refus d’octroi de l’aide internationale.

Selon un porte-parole de l’USAID, “nous avons exprimé notre inquiétude au sujet de la condamnation de Cu Huy Ha Vu, ainsi que nous l’avions fait s’agissant d’autres cas. Nos programmes d’aide ne sont cependant pas liés”.

Bien que l’aide internationale ne puisse être considérée comme un levier viable par les gouvernements étrangers, ils doivent être en mesure d’exercer une influence d’une autre manière. Les États-Unis, par exemple, ont indiqué que les questions de droit étaient un obstacle à une coopération plus étroite dans le domaine de la défense entre les deux nations. La Secrétaire d’État Hillary Clinton a évoqué le même problème au Sommet de l’Asie orientale en octobre dernier.

Une telle pression pourrait offrir une lueur d’espoir à ceux qui luttent pour un changement. “Il est bon d’adresser des messages d’ordre général demandant des améliorations en matière de droits de l’homme au Vietnam, mais ce n’est pas suffisant”, dit Phil Robertson de Human Rights Watch. “Ces messages doivent être clairs sur ce qui doit être fait”.

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