Les relations américano-sino-vietnamiennes après le 14ème sommet de l’APEC

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Le 14ème sommet des pays de l’APEC s’est déroulé à Hà Nôi du 18 au 19 novembre 2006.

En arrivant au Viêt Nam pour le sommet de l’APEC, Georges W. Bush et Hu Jintao avaient d’autres projets en tête que la coopération économique en Asie-Pacifique. C’est la raison pour laquelle les médias se sont largement focalisés sur les rencontres bilatérales Viêt Nam – États-Unis et Viêt Nam – Chine. Pourquoi ?

La visite officielle de Hu Jintao au Viêt Nam commence le 15 novembre, soit deux jours avant le sommet. Pour préparer le terrain, son ministre des affaires étrangères Li Zhaoxing est arrivé à Hà Nôi le 11 novembre. Le but de Li Zhaoxing est de convaincre les dirigeants communistes vietnamiens de créer, à l’initiative de la Chine, un Comité des Relations Bilatérales, régissant les questions stratégiques entre les deux pays. Les grandes lignes de ce Comité ont été présentées par Pékin au Parti Communiste Vietnamien (PCV) en octobre, avec pour objectif de l’officialiser lors de la visite officielle de Hu Jintao en novembre. Sous la pression de la Chine, le PCV signe la création du Comité des Relations Bilatérales le 16 novembre, avec Pham Gia Khiem, vice-premier ministre, nommé co-président du Comité. Son homologue chinois est Li Zhaoxing. Si la Chine est aussi pressée de créer ce Comité, c’est bien pour signifier aux États-Unis qu’elle a toujours une grande influence sur le petit frère communiste vietnamien.

Au cours de son entretien avec Nong Duc Manh (Premier Secrétaire du PCV) et Nguyen Minh Triet (Président du Viêt Nam), Hu Jintao fait 4 nouvelles propositions qui seront étudiées par les vietnamiens. Il s’agit de :

1) Augmenter la coopération économique entre les deux nations
2) Réformer les structures pour atteindre les 15 milliards de dollars dans les échanges commerciaux bilatéraux à l’horizon 2010
3) Augmenter le nombre de grands projets communs (5 grands projets ont été lancés le 16 novembre pour un montant de 3,6 milliards de dollars)
4) Augmenter la coopération économique avec les organisations internationales. La Chine serait disposée à faire partager au Viêt Nam son expérience commerciale acquise depuis son intégration à l’OMC.

Ces propositions ajoutées à la création du Comité montrent que Pékin n’entend pas laisser le Viêt Nam pencher du côté des États-Unis dans les domaines économiques et géostratégiques. Les propositions de Hu Jintao montrent également que la Chine surveille de près les relations entre Ha Nôi et Washington et voit d’un mauvais œil le rapprochement des anciens ennemis.

Pour sa part, avant de séjourner au Viêt Nam du 17 au 19 novembre, Georges W. Bush a dépêché à Hà Nôi la Secrétaire d’État Condoleeza Rise et le conseiller national à la sécurité Stephen Hadley pour préparer les discussions avec Nong Duc Manh. En principe, ces discussions devraient être menées par la Secrétaire d’État et non par le Président en personne. Ce changement montre que Washington joue simultanément sur deux plans. D’un côté, l’administration Bush retire le Viêt Nam de la liste des pays violant la liberté religieuse (CPC) avant que Rice atterrisse à Hà Nôi et pousse le Congrès à accorder le statut commercial normal permanent (PNTR) au Viêt Nam. De l’autre côté, Washington fait pression sur Hà Nôi pour qu’il accède à 3 requêtes américaines, à savoir :

1) Accepter la surveillance des États-Unis sur le programme nucléaire vietnamien à Da Lat afin d’éviter un problème similaire à celui de la Corée du Nord
2) Participer au programme de coopération visant à ne pas diffuser d’armes de destruction massive
3) Accepter les activités des organisations caritatives américaines (Peace Corps) au Viêt Nam

Ces requêtes sont somme toute assez banales dans les relations des États-Unis avec d’autres nations. En revanche, elles le sont moins pour les autorités vietnamiennes qui ont refusé à plusieurs reprises de les satisfaire à cause de l’influence du grand frère chinois.

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Georges W. Bush et Nguyen Minh Triet

En rencontrant les dirigeants vietnamiens à Hà Nôi, Georges Bush a abordé la nécessité d’accroître la coopération entre les deux pays afin de contribuer à la résolution des problèmes régionaux et mondiaux. Washington est prête à aider au développement économique du Viêt Nam par des investissements directs mais demande à Hà Nôi d’accepter un partenariat stratégique avec les américains, sur deux points concrets. D’abord la coopération militaire, notamment dans les domaines maritimes et terrestres. Ensuite la location d’un port militaire afin que les bâtiments de l’US Navy de la flotte du Pacifique puissent ravitailler sur le chemin du Moyen Orient. Selon diverses sources, le Pentagone chercherait à louer un port au nord de Cam Ranh, au centre du Viêt Nam. Mais Hà Nôi craint la réaction de la Chine. Une telle décision n’est pas difficile à prendre pour un pays indépendant et autonome, mais pour les autorités communistes vietnamiennes c’est un dilemme car Pékin cherche également à louer Cam Ranh, l’ancienne base navale de l’URSS.

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Hu Jintao et Georges W. Bush

Les pressions de Georges Bush et Hu Jintao démontrent qu’américains et chinois veulent placer leurs pions rapidement sur l’échiquier vietnamien, dans le but d’attirer ce pays dans leur zone d’influence respective. Autrement dit, les propositions de coopérations économiques, commerciales, d’investissements directs visent le même but : amener le Viêt Nam à coopérer militairement avec la Chine ou avec les États-Unis pour faire pencher l’équilibre géostratégique en Asie du Sud-Est. Washington et Pékin présentent la coopération économique comme une carotte devant Hà Nôi, pour que celle-ci serve leurs intérêts propres dans la région. Une fois ce problème posé, on comprend mieux pourquoi la situation politique au Viêt Nam va se complexifier. Les mouvements pro-démocratiques ne doivent plus seulement faire face au PCV ; ils doivent aussi compter avec les ambitions américaines et chinoises. Ces ambitions sont certainement contraires aux intérêts et aspirations du peuple vietnamien.

En résumé, les relations entre le Viêt Nam et les États-Unis et la Chine après le 14ème sommet des pays de l’APEC vont devenir plus complexes. Le Viêt Nam fait l’objet d’une concurrence entre américains et chinois. Les autorités communistes vietnamiennes sont foncièrement avides, cherchant toujours un appui à l’étranger pour « stabiliser la situation politique intérieure ». Les dirigeants vietnamiens seront bien embarrassés pour répondre aux pressions des deux grandes puissances, sans compter la pression populaire toujours plus forte depuis quelque temps.

Ly Thai Hung
21 Novembre 2006

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