Saisie en mer de Chine méridionale

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Tribune de Duy Hoang, membre du Comité Central du Viet Tan, publiée dans The Wall Street Journal, le 6 février 2008


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Lorsque la Chine a créé une nouvelle entité administrative couvrant trois archipels de la mer de Chine du Sud en décembre 2007 – dont deux revendiqués par le Vietnam – Pékin a de nouveau enflammé un fâcheux dilemme pour Hanoi. Le Vietnam devrait-il faire valoir son intérêt national en affirmant la revendication historique vietnamienne sur les territoires contestés, ou bien défendre les intérêts étroits du Parti Communiste en se vassalisant au Parti communiste chinois qui fournit un appui politique à Hanoi ?

Ce dilemme est le dernier développement dans un différend de longue date. Les archipels Spratly et Paracels en mer de Chine méridionale sont composés de petites îles et récifs riches en poissons, recélant peut-être des réserves de pétrole, et sont stratégiquement situés sur l’une des voies maritimes les plus fréquentées au monde. Pour les pays qui ont un intérêt dans la liberté de navigation et dans un règlement pacifique des différends maritimes, la question de la mer de Chine du Sud a des implications stratégiques. Le pétrole du Golfe Persique à destination du Japon et de la Corée du Sud passe à travers ces eaux. Et la marine américaine ne veut pas laisser la Chine considérer cette mer comme son lac privé.

Depuis plusieurs siècles, les dynasties impériales vietnamiennes ont revendiqué ce qui est maintenant connu sous le nom d’îles Spratly et Paracels. Et les Vietnamiens ne sont pas les seuls à avoir les yeux sur les îles. La Chine, Taiwan, Brunei, la Malaisie et les Philippines revendiquent tout ou partie de ces archipels. Le président taiwanais Chen Shui-bian a lui même inauguré une piste d’aviation sur l’une des îles Spratly au début de ce mois.

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Au 20e siècle, la revendication du Vietnam est devenue une monnaie d’échange dans le cadre d’une lutte plus large pour le contrôle du pays. En 1958, quatre ans après la partition du Vietnam en Nord et Sud au niveau du 17e parallèle, le Premier ministre nord-vietnamien Pham Van Dong a envoyé un câble à Zhou Enlai reconnaissant les revendications chinoises sur l’ensemble les îles de la mer de Chine méridionale. Ce faisant, les Communistes du Nord-Vietnam espéraient obtenir la garantie du soutien chinois dans la guerre contre le Sud-Vietnam.

Peu importait que ces îles ne fussent pas sous le contrôle de Hanoi à ce moment-là – lors de la partition du pays, la possession de ces archipels était revenu de facto au Sud-Vietnam car ils se situent au sud du 17è parallèle. En 1974, profitant de la guerre du Vietnam, Pékin a cherché à concrétiser sa revendication en envahissant les Paracels. Après trois jours de bataille navale, la Chine prit le contrôle de l’archipel Sud-Vietnamien. Hanoi réagit en affirmant qu’il valait mieux que les îles soient entre les mains d’un pays frère communiste plutôt que dans celles du régime de Saigon.

Après la guerre, Hanoi a officiellement soutenu que les îles Spratly et Paracels appartenaient au Vietnam, mais a souvent fermé les yeux devant les actions chinoises destinées à contrôler intégralement ces îles. Ces dernières années, des navires de guerre chinois ont parfois ouvert le feu sur des bateaux de pêche vietnamiens et tué des dizaines de personnes dans les eaux au large du Vietnam, que la Chine considère comme sa zone économique exclusive. La Chine considère les pêcheurs vietnamiens comme des pirates. Mais l’État vietnamien et les médias officiels ont largement ignoré ces attaques. Quelques rares articles mentionnent vaguement une fusillade contre les pêcheurs vietnamiens par des navires « étranger. »

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Pendant ce temps à l’intérieur du Vietnam, les revendications sur ces îles trouvent un écho nationaliste. Malgré les gros efforts du régime pour garder ce différend hors de l’esprit des gens, afin d’éviter d’alimenter les tensions avec Pékin, c’est encore une question qui enflamme les passions dans la rue. Récemment, un mouvement à l’intérieur du Vietnam a demandé au gouvernement de porter la question des îles Spratly et Paracels devant le Conseil de Sécurité des Nations Unies. Les nouvelles selon lesquelles la Chine a resserré son emprise administrative sur ces îles ont déclenché des protestations sans précédent des étudiants devant les représentations diplomatiques chinoises à Hanoi et à Saigon.

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Les autorités vietnamiennes ont pris des mesures pour interdire les manifestations. La police est allée jusqu’à placer en détention des bloggers qui font de la publicité sur les manifestations. Pourtant, la pression est peut-être devenue un peu trop grande. Dans une tentative de minimiser la gravité de la récente décision chinoise, les médias officiels vietnamiens ont donné un large écho à un article paru dans le South China Morning Post quelques semaines plus tard, qui cite un fonctionnaire chinois disant qu’il n’était pas au courant de la création de cette nouvelle entité administrative des îles Paracels et Spratlys. Cette affaire s’est complexifiée après que le Vietnam a durement gagné un siège au Conseil de Sécurité. Le régime espérait que ce siège non permanent lui donnerait une occasion de renforcer son image aussi bien au niveau national qu’à l’étranger. Mais Hanoi doit maintenant faire face aux appels publics lui demandant d’utiliser sa position sur la scène mondiale pour poursuivre une revendication territoriale nationaliste, qui va à l’encontre des intérêts du parti au pouvoir.

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Sans aucun doute, nombreux sont ceux, dans le régime de Hanoi – et plus particulièrement dans l’armée populaire du Vietnam – qui sont préoccupés par l’expansionnisme chinois. Mais encore plus nombreux sont ceux qui, au sein du régime, ont peur de « l’évolution pacifique », le nom de code utilisé par le Parti Communiste Vietnamien pour parler du changement démocratique qui pourrait arriver si le Vietnam s’éloignait de la Chine et se rapprochait de l’Occident. Il est difficile pour Hanoi de continuer à suivre le modèle chinois – économie libéralisée, fermeture politique – et de s’opposer en même temps à son mentor, compte tenu de la dépendance idéologique de Hanoi vis-à-vis de Pékin. Pourtant, la plus grande crainte pour le régime n’est pas la Chine. C’est celle d’une nouvelle génération de Vietnamiens qui sont de plus en plus engagés dans le débat qui oppose l’intérêt national à l’intérêt d’un parti politique ; c’est aussi la crainte que cette génération soit issue du peuple et qu’elle soit moins disposée à tolérer la censure gouvernementale sur ce débat.

M. Hoang est un des dirigeants du Viet Tan, un parti politique pro-démocratie et non autorisé au Vietnam.


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