8 février 2013
Graham Cooke
La libération de Nguyen Quoc Quan après neuf mois dans une prison vietnamienne n’a pas beaucoup attiré l’attention des médias, ce qui est surprenant étant donné que Quan est citoyen américain et qu’il n’a jamais été entendu par un tribunal pour répondre des accusations de terrorisme portées contre lui.
Décrit différemment comme mathématicien, ingénieur en informatique ou ancien professeur, le principal but de la visite de Quan au Vietnam était d’y rencontrer sa sœur. Cela fait toutefois depuis longtemps qu’il est membre de Viet Tan, une organisation qui est reconnue légalement dans tous les pays du monde sauf au Vietnam qui le considère comme subversif et terroriste.
Les autorités vietnamiennes prétendent que Quan a été arrêté à l’Aéroport de Hô Chi Minh-Ville parce qu’il avait sur lui de la littérature subversive, mais Phong Nguyen, le représentant de Viet Tan en Australie, dit que la seule raison pourrait être qu’il est membre de Viet Tan.
“Dr Quan n’a fait aucun secret du fait qu’il est un militant et qu’il soutient les objectifs de Viet Tan, qui sont de faire campagne pour la liberté d’expression, le respect des droits de l’homme et, au final les libertés démocratiques au Vietnam”, a déclaré Phong.
“Mais prétendre qu’il était dans le pays pour renverser le gouvernement ou pour faire exploser je ne sais quoi est ridicule. Viet Tan est et a toujours été une organisation qui recherche à parvenir à ses objectifs au travers de moyens non violents”.
Un communiqué du gouvernement vietnamien déclare que Quan avait “avoué son crime” et avait plaidé pour la clémence.
Quan est au moins libre. On ne peut pas en dire autant des 14 activistes vietnamiens qui ont récemment été condamnés à des peines allant de 3 à 13 ans de prison assortis de différentes périodes d’assignation à résidence. Il y a deux femmes parmi le groupe et alors que la majorité est affiliée à l’Église catholique, aucun ne revendique être membre de Viet Tan.
Phong dit que la plupart des jeunes accusés sont des blogueurs, qui ont utilisé les sites de réseaux sociaux pour contester les lois gouvernementales et appelé à plus de liberté démocratique. Parmi ceux emprisonnés figure Paulus Le Son, qui a été condamné à 13 ans de prison suivis de cinq ans de résidence surveillée.
“Ils l’ont accusé de travailler pour Viet Tan et de publier des articles subversifs. Parmi les choses qu’il a vraiment écrit, il commente le conflit entre le Vietnam et la Chine qui concerne la propriété des Îles Paracels, il soutient la réclamation territoriale du Vietnam et exhorte le gouvernement à prendre une attitude plus ferme envers la Chine”, dit Phong.
“La Chine a agi en agresseur, disant que sa réclamation sur les îles était “incontestée” et arrêtant les pêcheurs vietnamiens. Je ne peux pas comprendre comment ce genre de pensées patriotiques pro-vietnamiennes peuvent être considérées comme subversives”.
Il dit que Viet Tan travaille avec d’autres organisations des droits de l’homme sur une requête auprès du Groupe de travail sur la Détention Arbitraire des Nations Unies, qui examine les cas de privation de liberté imposée arbitrairement et qui sont contraires à la Déclaration Universelle des droits de l’homme.
“Nous croyons que l’arrestation de ces jeunes activistes relève du mandat du groupe et nous espérons que cela fera pression sur le gouvernement de Hanoï pour qu’il reconsidère ces condamnations brutales” dit Phong.
“Quand ils sont passés en jugement, nous avons d’abord craint que ce traitement sévère annihilerait toute opposition, mais nos recherches ont montré tout le contraire, avec même plus de blogs et de protestations qu’auparavant. Les gens disent même que si les gouvernements peuvent changer au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, alors pourquoi pas ici ?
“Je tiens encore une fois à souligner que Viet Tan ne soutient pas la révolution violente, mais nous croyons que le moment est venu. Le Gouvernement Communiste de Hanoï doit tenir compte des voix du peuple qui aspirent à plus de liberté et à un plus grand chapitre dans les affaires de la nation.
“Ce que nous allons faire au cours de l’année est de continuer à soutenir ces voix, sans tenir compte d’où ils sont et qui ils sont. Nous allons sensibiliser les gens à l’échelle internationale et tous les médias, les ONGs ou les Gouvernements qui nous soutiendront.”
L’arrestation des militants et la libération de Quan viennent à un moment délicat dans les relations du Vietnam avec l’Occident, et les deux incidents font plus penser à un jeu de puissance internationale qu’à des luttes internes.
Le Secrétaire Général du Parti Communiste vietnamien, Nguyen Phu Trong, est récemment rentré d’une tournée en Europe dont une audience avec le Pape Benoît XVI. Un communiqué publié après la rencontre déclarait que le Saint-Siège avait exprimé l’espoir “que certaines situations en instance pouvaient être résolues et que la coopération existante pouvait être renforcée”. – un avertissement à peine voilé de cesser la persécution des Catholiques vietnamiens, qui représentent encore un pourcentage important de la population.
Les réunions avec le Premier Ministre Britannique David Cameron et les représentants de l’Union européenne se sont axées sur le commerce. Mais, ce qui est intéressant, c’est que le Sous-Secrétaire d’État britannique pour la Défense, Lord Astor, s’est ensuite rendu au Vietnam.
Comme d’autres pays du Sud-Est asiatique, le Vietnam est préoccupé par la puissance militaire et économique émergente de la Chine, et son attitude plus agressive dans ses réclamations territoriales en Mer de Chine méridionale – les Îles Paracels étant un exemple. Idéalement il recherche un équilibre en tissant des liens plus étroits avec l’Occident. La solution étant évidemment une présence américaine continue dans la région. Cependant, avec une population vietnamienne conséquente aux Etats-Unis, notamment Viet Tan, et une Maison Blanche qui donne la priorité absolue aux droits de l’homme, Hanoï doit avancer sur la pointe des pieds . La libération de Quan est une concession attendue depuis trop longtemps. Il reste à voir si une réduction des condamnations prononcées sévèrement au Vietnam envers les 14 suivra aussi.
Nous avons demandé à l’Ambassade du Vietnam à Canberra de réagir à cet article. Nous n’avons reçu aucun commentaire.
Source : On line opinion
