Violations des droits de l’homme au Vietnam : 14 députés européens demandent au Conseil Européen de ne pas signer l’EVFTA

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À :

  • Donald Tusk, Président du Conseil européen

CC :

  • Jean-Claude Juncker, Président de la Commission européenne
  • Federica Mogherini, Haute représentante/Vice-présidente de la Commission européenne
  • Cecilia Malmström, Commissaire européenne au commerce
  • Les ambassadeurs du COREPER II
  • Le groupe Asie/Océanie (COASI)

 

Bruxelles, le 21 juin 2019

Re: Signature et ratification de l’accord de libre-échange Vietnam-UE/Accord sur la Protection des Investissements et répression des droits de l’Homme au Vietnam

Monsieur Tusk,

Nous soussignés, membres du Parlement Européen, vous adressons cette lettre en amont de l’examen de l’accord de libre-échange Vietnam-UE et de l’accord sur la Protection des Investissements (EVFTA/IPA) pour vous faire part de nos inquiétudes face à la détérioration du respect des droits de l’Homme au Vietnam. Nous demandons au Conseil européen, à la Commission européenne, au SEAE et aux États-membres de l’Union Européenne d’agir de manière résolue et coordonnée afin de garantir des améliorations concrètes et durables dans le domaine des droits de l’Homme au Vietnam, en perspective des procédures de signature et de ratification des accords.

Comme il l’a été reporté par le SEAE[1],  par certaines organisations non gouvernementales[2] ainsi que par des organismes indépendants[3], et comme souligné lors du dernier examen périodique universel du Vietnam au Conseil des droits de l’Homme des Nations-Unies[4], le Vietnam n’a montré aucun progrès significatif concernant son piètre bilan en matière de droits de l’Homme au cours des dernières années. Au contraire, la répression s’est intensifiée depuis 2016, avec notamment une augmentation du nombre d’attaques, d’agressions physiques et d’arrestations. Cette répression s’est aussi traduite par de longues périodes de détention sans possibilité d’avoir accès à un avocat ainsi que de lourdes peines de prison prononcées à l’égard de militants pacifiques, emprisonnés en application de dispositions draconiennes du Code Pénal et de procédure pénal, mais aussi en vertu de la nouvelle loi problématique sur la cybercriminalité.

Tous ces évènements ont pu voir le jour malgré les nombreux appels de la communauté internationale (dont ceux du SEAE et le Parlement européen[5]) à inverser cette tendance répressive.

Il convient également de souligner que cette grave détérioration a commencé juste après la conclusion des négociations de l’EVFTA/IPA et parallèlement à la ratification des Accords de Partenariat et de Coopération (APC) avec l’UE.

Le Vietnam fait partie des États-signataires de nombreux traités relatifs aux droits de l’Homme[6]. Parmi ces derniers se trouve, entre autres, le Pacte international relatifs aux droits civils et politiques (PIDCP). Le Vietnam est en outre tenu d’honorer ses obligations internationales en matière de droits de l’Homme, conformément à l’APC ainsi qu’au titre du système de préférence généralisées SPG. Il est également à noter que l’APC et l’EVFTA/IPA sont formellement liées lorsqu’il s’agit de violations d’éléments essentiels de l’APC, y compris au sujet des droits de l’Homme.

À la lumière de ces violations systématiques et persistantes des obligations internationales en matière de droits de l’Homme, nous regrettons que le calendrier menant à la signature de l’EVFTA/IPA n’ait pas permis de définir clairement des standards ou des échéances pour inverser la tendance actuelle. En outre, les dispositions du chapitre consacré au Commerce et au Développement Durable de l’accord de libre-échange tels que ceux concernant les conventions fondamentales de l’OIT n’engage le Vietnam qu’à « faire des efforts soutenus et constants en vue d’une [ratification] ». Il s’agit d’une obligation qui, faute d’un délai et d’un mécanisme solide de mise en œuvre, pourrait être indéfiniment ajournée.

Enfin, concernant le lien entre l’APC et l’EVFTA/IPA, nous sommes conscients des coûts très élevés de la suspension des préférences commerciales, un coût explique également pourquoi une telle suspension ne s’est jamais produite dans le cadre de tout accord commercial bilatéral. Néanmoins, cette clause sur les « éléments essentiels » devrait servir d’outil au cours des négociations ainsi qu’en amont du processus de ratification afin d’obtenir des progrès en cas de situations très critiques.

En effet, nos relations bilatérales avec le Vietnam étant déjà encadrées par l’ACP, ses engagements et principes s’appliquent à tout autre accord bilatéral.  Ainsi, le fait de montrer que nos relations s’améliorent pendant que ces principes sont continuellement violés renverrait un mauvais signal.

À la lumière de ces éléments, nous pensons que l’UE devrait faire tout ce qui est en son pouvoir pour garantir quelques améliorations tangibles des droits de l’Homme au Vietnam avant la signature et la ratification de l’EVFTA/IPA. Il devrait y avoir des signaux forts et concrets indiquant que le gouvernement vietnamien s’engage sincèrement à revenir sur sa campagne abusive contre les droits humains de son peuple.

Ces étapes devraient inclure :

  • La libération et la réhabilitation complète de tous les prisonniers politiques, en tant que mesure de confiance immédiate. Cette étape doit tout d’abord concerner les personnes ayant signalé des problèmes de santé, afin qu’elles puissent recevoir les soins médicaux adéquats (notamment Ngo Hao, Tran Huynh Duy Thuc, Hoang Duc Binh, Nguyen Van Tuc, and Nguyen Trung Ton).
  • L’engagement public à abroger ou réviser les articles 109, 116, 117, 118 et 331 du Code Pénal, les articles 74 et 173 du Code de procédure pénale ainsi que la loi sur la cybersécurité. Cet engagement devra également s’étendre à une collaboration avec les organes de l’Union européenne et de l’ONU pour rendre le Code Pénal vietnamien conforme aux obligations du Vietnam au titre du PIDCP, et l’établissement d’un calendrier clair pour le faire.
  • La prise de mesures concrètes pour reconnaître les syndicats indépendants et l’annonce publique d’une feuille de route claire assortie d’échéances pour la ratification des conventions fondamentales restantes de l’OIT. Cette prise de mesures devra s’accompagner par la modification de la législation du travail, la mise en conformité de ces lois avec les conventions fondamentales de l’OIT ainsi que l’engagement à coopérer de bonne foi avec l’UE, l’OIT et les organisations indépendantes de la société civile dont le rôle pourra être de surveiller la bonne mise en œuvre du processus.

De tels engagements positifs et concrets de la part des autorités vietnamiennes constitueront certainement des points de repère importants pour le Parlement lorsqu’il envisagera de donner son consentement à l’EVFTA/IAP.

Très cordialement,

MEP Maria Arena

MEP Margrete Auken

MEP Reinhard Bütikofer

MEP Karoline Graswander-Hainz

MEP Theresa Griffin

MEP Heidi Hautala

MEP Agnes Jongerius

MEP Jude Kirton-Darling

MEP Miapetra Kumpula-Natri

MEP Aurore Lalucq

MEP Ana Miranda

MEP Maria Noichl

MEP Joachim Schuster

MEP Julie Ward

[1] https://eeas.europa.eu/delegations/vietnam/62647/statement-behalf-eu-ambassador-vietnam-recent-convictions-ms-vu-thi-dung-and-ms-nguyen-thi_en

[2] https://www.amnesty.org/en/latest/news/2019/05/viet-nam-surge-number-prisoners-conscience-new-research-shows/

[3] https://www.ohchr.org/EN/NewsEvents/Pages/DisplayNews.aspx?NewsID=24324&LangID=E

[4] https://www.ohchr.org/EN/HRBodies/UPR/Pages/VNindex.aspx

[5] http://tremosa.cat/noticies/32-meps-send-joint-letter-mrs-mogherini-and-commissioner-malmstrom-ask-more-human-rights-progress-vietnam

[6] https://tbinternet.ohchr.org/_layouts/15/TreatyBodyExternal/Treaty.aspx?CountryID=192&Lang=EN

 

Source : MEP Heidi Hautala

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